Une responsabilité en péril – Nouvelle – Page 4

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– Alors, tu as pu parler à ton vieux ?

– Oui Marcel, j’ai pu faire ça.

– Et alors ?

– Il va rien faire, il reste campé sur les intérêts de notre famille.

– Pas étonnant, ça reste un patron.

– Pff, j’aurais aimé qu’il mette au moins de sa capacité de réflexion « si précieuse à une vie d’homme » comme il dit. J’aurais aimé qu’il imagine au moins l’option où on ne fait pas rien pour eux, même s’il n’en fait rien.

– En plus là, la situation est très inquiétante, les juifs qui ont été convoqués au commissariat et bin, ils ne sont jamais rentrés chez eux. Je peux te le dire, ne pas agir, c’est participer à un massacre. Du coup, tu comptes faire quoi pour eux ?

– Toi, tu pourrais pas les avertir ?

– Oui je pourrais, mais bon si c’est que moi qui me mouille, on gagne pas un militant en plus dans cette lutte. C’est bien que chacun apporte sa part. Et puis si le conseil vient du fils du patron, ça sera plus percutant que d’un inconnu qui a tout l’air d’un communiste, avec la propagande pétainiste, difficile de pas passer pour des exagérateurs-menteurs.

Dis-moi Paul, comment tu souhaiterais que l’Histoire se souvienne de toi ?

– Il est peu probable que l’Histoire se souvienne de moi dans cette affaire, si j’agis, je ne serai rien de plus qu’un petit soldat effacé dans la grande histoire des puissances en opposition. Jouer le jeu de l’histoire, c’est participer au jeu de la guerre. Je suis pacifiste moi, pas guerrier.

– Enfin là, on te demande pas de partir avec un fusil tirer sur la gestapo. Le risque est faible si tu te comportes juste en conseiller. Tu les informes de ce qui se passe c’est tout et c’est eux qui décident. Qu’est-ce que tu voudrais pouvoir raconter à tes futurs enfants sur cette histoire ? Que tu as été un résistant pacifiste, en ne t’impliquant pas politiquement ?

– Encore toi et tes histoires de politique…

– Mais la société est politique, la politique c’est le matériau qui transforme la société. La société, c’est ce qui transforme l’humain. Si on n’utilise pas la politique, on la laisse au main des puissants qui nous produisent une vie de soumission, de souffrance, propice à la haine, à la guerre et à l’horreur. Tu es né de la société, tu es politique, c’est logique, comme tu es né de la vie, tu respires, c’est aussi logique.

– Oui mais moi mon statut de fils de propriétaire, me donne la possibilité d’une vie heureuse et paisible, pourquoi j’irais gâcher ça pour une oppression qui ne me concerne pas.

– Parce que ton statut te donne une connaissance que tu n’aurais pas si tu étais un premier concerné. Maintenant, la question c’est : qu’est-ce que tu souhaites faire de cette connaissance ? Rien en faire, perdre la face et un ami, ou garder la face et conserver une amitié ?

– et peut-être perdre une famille…

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