Quelle pourrait-être la meilleure manière d’agir positivement sur mon Surmoi et mon Empathie ?

L’autorité négligente ou abusive peut engendrer un Surmoi et une forme d’Empathie dysfonctionnels qui sont sources de souffrance et font obstacle à l’épanouissement. Actuellement, ces deux phénomènes d’automatisme psychique affectent ma capacité à bien relationner, à prendre des décisions éclairées et à cheminer vers une meilleure harmonie personnelle et relationnelle.

Il me semble que plus j’aurais de maîtrise sur ma parentalité et ma soumission automatiques, et plus j’obtiendrais de la sécurité et de la marge de manœuvre personnelles. Me permettant par la même de mieux explorer et développer les territoires sociaux (ce que les autres font avec moi).

Les raisons d’être du Surmoi et de l’Empathie

Le Surmoi, issue de la théorie psychanalytique de Sigmund Freud, représente l’instance psychique qui incarne les valeurs morales, les normes sociales et les idéaux que nous avons intériorisés. Il joue un rôle central dans notre parentalité acquise, souvent inconsciente, qui évalue nos pensées et comportements en générant des réactions émotionnelles. Ainsi, il produit un sentiment de plaisir-fierté lorsque nous agissons en accord avec ce que nous percevons comme étant « bien », et de souffrance-punition lorsque nous agissons en désaccord avec ses valeurs. Cette guidance émotionnelle, qui contribue à la reproduction sociale, est utile à la fois pour notre survie sociale individuelle et pour renforcer la cohésion du groupe, essentielle à sa survie et à son développement. En intériorisant et en défendant les normes et les valeurs transmises par nos figures parentales et sociales, le Surmoi agit comme un mécanisme d’adaptation qui nous aide à nous conformer aux attentes du groupe, réduisant les risques d’exclusion sociale et concourant à la performance de celui-ci.

L’Empathie, quant à elle, est la capacité psychique à percevoir, comprendre et ressentir les émotions ou expériences d’autrui. Elle joue un rôle central dans notre aptitude sociale en nous connectant émotionnellement aux autres pour anticiper leurs besoins et leurs ressentis et y répondre de manière plus ou moins adaptée. Elle joue aussi un rôle dans le mimétisme nécessaire à l’apprentissage et au développement de notre socialité, permettant une meilleure adaptation aux dynamiques de groupe. Cette faculté, qui joue aussi un rôle prépondérant dans la reproduction sociale, offre à notre espèce un avantage : elle permet de multiplier la capacité à résoudre ensemble les problèmes rencontrés par un ou plusieurs membres du groupe auquel on se sent appartenir, tout en assurant une transmission rapide et efficace des comportements, savoir-faire et connaissances observés chez les autres, ce qui favorise la culture et l’évolution sociale.

Quelle peuvent être les problématiques à l’œuvre dans ces phénomènes ?

Plus les attentes des autorités ont été excessives et strictes pendant l’enfance, plus notre Surmoi sera excessif, lourd et pesant envers nous-mêmes et envers les autres. Plus la manière de dispenser les punitions était violente et les récompenses inadaptées, plus notre manière de réagir au signal de la faute ou de la bonne action sera disproportionnée, éprouvante, insuffisante ou dysfonctionnelle.

L’Empathie, elle, au-delà de l’aptitude sociale qu’elle génère, participe de la possibilité et de l’entretien d’une soumission individuelle abusive. En participant d’un système automatisé de satisfaction des besoins des autres, elle met à disposition l’activité de notre cerveau et de notre corps au service des autres en fonction de notre éducation reçue (le biais cognitif du Surmoi sur notre réaction empathique). Par ce mécanisme de domestication de notre corps, de nos émotions et de notre esprit, l’empathie peut devenir une faculté « automatiquement détournée » pour répondre aux attentes des autres, au détriment de nos propres intérêts. Afin de se conformer aux systèmes de sanctions-récompenses imposés par nos autorités abusives, notre corps a développé une soumission automatique impliquant notre capacité d’empathie. Plus les punitions subies dans l’enfance étaient sévères, plus notre psychisme aura développer notre propension empathique afin de toujours mieux faire face à notre enjeu de survie individuelle, créant une cérébralité empathique accrue et un phénomène de soumission à l’autre automatique et disproportionné par rapport à un enfant de même constitution ayant bénéficié d’une parentalité plus fonctionnelle.

Dans quelle mesure pouvons nous agir sur notre Surmoi et notre Empathie ?

Le développement de notre système cognitif et psychique est conditionné par notre parentalité reçue et les patterns comportementaux qu’elle a inscrits en nous. Selon Jeffrey E. Young, fondateur de la thérapie des schémas, nos expériences répétées avec des figures d’autorité forment des schémas profonds (ou patterns) qui influencent nos réactions émotionnelles et comportementales tout au long de notre vie. Ces schémas automatiques sont inadaptés à la réalité présente, car en premier lieu, nous avons grandi et ne sommes plus des enfants (notre pouvoir est plus grand) et, en second lieu, ce mode de fonctionnement archaïque et automatique est par nature simpliste et ne réagit pas de manière fine et adaptée à la complexité des enjeux sociaux de notre société moderne. Ainsi, une empathie exacerbée et un Surmoi abusif, façonnés pour éviter les punitions ou obtenir des récompenses dans l’enfance, devient un mécanisme dysfonctionnel à l’âge adulte.

Des travaux comme ceux de Bessel van der Kolk (Le corps n’oublie rien) soulignent comment ces schémas s’inscrivent non seulement dans le psychisme, mais aussi dans le corps, renforçant ainsi des réponses réflexes à des contextes perçus comme menaçants. Guérir de cette domestication n’est pas simple, car ces schémas sont enracinés dans les connexions neuronales stabilisées par la répétition et renforcées par les émotions intenses vécues dans l’enfance. Daniel Siegel, à travers ses recherches en neurobiologie interpersonnelle, a également montré comment ces réponses automatiques sont ancrées dans les circuits neuronaux du système limbique, rendant leurs modifications un processus exigeant.

Même avec une compréhension rationnelle des origines de nos comportements, ces patterns tendent à se reproduire automatiquement, rendant le processus de transformation difficile. En d’autres termes, transformer le Surmoi abusif et l’Empathie automatiquement soumise nécessite un travail conscient et répétitif pour rééduquer nos automatismes psychiques, ce qui inclut la reconnaissance des schémas hérités, leur désactivation progressive et l’installation de réponses plus alignées avec notre bien-être personnel.

Des recherches en neurologie et psychologie ont montré que la reprogrammation des schémas psychiques hérités de l’enfance repose sur la plasticité cérébrale, c’est-à-dire la capacité du cerveau à se réorganiser et à se réadapter tout au long de la vie. Grâce à cette plasticité, il est possible de développer de nouvelles connexions neuronales, d’ajuster les réponses émotionnelles et de reconfigurer les perceptions de soi et du monde, sans pour autant pouvoir nourrir un optimisme démesuré sur une transformation complète et effective qui nous guérirait totalement et définitivement de notre domestication abusive. Il va nous falloir composer avec, en faisant en sorte, que cela le soit de moins en moins et de mieux en mieux.

Quel pourrait être le Surmoi et l’Empathie Idéaux ?

Un Surmoi et une Empathie idéaux se situeraient dans un équilibre entre leurs fonctions adaptatives et la liberté individuelle. Plutôt que d’imposer une autorité tyrannique et de générer une soumission automatique, ces instances psychiques devraient devenir des alliées bienveillantes au service d’un épanouissement personnel, favorisant la réalisation et l’enbonheurement individuel, et collectif, soutenant la cohésion et le développement harmonieux des relations au sein du groupe.

Le Surmoi idéal ne serait ni oppressif ni paralysant. Il fonctionnerait comme un guide adapté, éclairé par des valeurs que l’individu a choisies consciemment, et non par celles imposées par des figures d’autorité abusives ou des injonctions sociales obsolètes. Ce Surmoi évolué encouragerait la responsabilité personnelle tout en évitant les jugements excessifs, permettant à l’individu de naviguer dans les exigences sociales sans écraser sa créativité ou son authenticité. Il valoriserait l’exploration de nouvelles normes et de nouveaux comportements, soutenant une éthique flexible et adaptée aux contextes variés.

L’Empathie idéale, quant à elle, serait capable de discerner entre les besoins des autres et ceux de soi-même. Elle ne fonctionnerait plus comme un automatisme incontrôlé qui sacrifierait l’individu sur l’autel des attentes extérieures. À la place, elle permettrait une connexion émotionnelle authentique et réciproque, dans laquelle l’individu peut choisir consciemment d’être présent pour l’autre tout en restant ancré dans ses propres limites et en prenant rationnellement en compte sa compréhension et ses intérêts. Cette empathie équilibrée favoriserait des relations respectueuses et épanouissantes, évitant autant l’abus que la négligence vis à vis de soi et des autres.

L’atteinte d’un Surmoi et d’une Empathie idéaux repose sur un processus d’harmonisation continue. Les fonctions psychiques à l’œuvre doivent rester flexibles, évolutives, et capables de s’ajuster aux changements personnels et sociaux. Cela nécessite un travail conscient et régulier pour déconstruire les schémas dysfonctionnels et cultiver une présence à soi bienveillante.

Comment se transformer au mieux vers cet idéal ?

  1. Reconnaître mes schémas dysfonctionnels

La première étape pour moi est d’identifier les automatismes que j’ai hérités de mes soumissions aux autorités parentales, scolaires, professionnelles, amicales, idolâtrées. Ces schémas d’automatismes psychiques, souvent inconscients, influencent mes décisions, mes émotions et mes relations. Pour les reconnaître, j’essaie d’être attentif aux situations où mes réactions sont disproportionnées ou automatiques, et j’essaie de comprendre les valeurs et croyances sous-jacentes qui les nourrissent.

Certaines approches thérapeutiques, comme les thérapies basées sur les schémas de Jeffrey E. Young vu plus haut, m’aident à mettre en lumière ces mécanismes inconscients. La pratique de l’écriture introspective via ce blog et un travail de psychanalyse m’aident à mieux comprendre les origines de ma « programmation réactionnelle apprise » et comment elle influence mon corps, mes émotions, mon esprit et mon quotidien.

  1. Désactiver mes réponses automatiques

Pour l’avoir expérimenté, la désactivation des réactions automatiques et des croyances et valeurs limitantes est au cœur du processus de transformation. Cela exige de prendre conscience de mes automatismes et de les remettre en question avec ma raison. En devenant plus conscient de ces réflexes, j’apprends à analyser et à réfléchir, afin de répondre différemment, de manière plus adaptée à chaque situation.

Je sais que la conscience et la raison ont leurs limites, surtout lorsqu’elles sont perturbées par des émotions intenses, la fatigue ou des biais cognitifs. Cela m’oblige à renforcer ma pratique régulière de la méditation de pleine conscience, pour développer mon observation sans jugement et maintenir un niveau de présence heureuse suffisante pour mettre mon esprit dans une disposition existentielle positive. Des outils comme la restructuration cognitive (en usant d’autohypnose) m’aident aussi à reformuler des pensées négatives et à m’en détacher.

J’utilise aussi l’auto-compassion, selon l’approche de Kristin Neff, pour renforcer ma connexion avec moi-même. Cela me permet d’accepter mes imperfections et mes vulnérabilités. En parallèle, les recherches de Carol Dweck sur les mentalités m’aident à cultiver une mentalité de croissance, à voir les erreurs et les défis comme des occasions d’apprendre, plutôt que des échecs personnels.

Les recherches en neurosciences confirment que de nouvelles connexions neuronales peuvent se former, renforçant ainsi des réponses plus adaptées avec la répétition de pratiques conscientes. Par ailleurs, des approches comme la thérapie centrée sur les émotions, de Leslie Greenberg, m’aident à accéder à des émotions sous-jacentes et à mieux réguler celles-ci.

Cette approche aide à identifier et à différencier les différentes émotions ressenties, qu’elles soient primaires (émotions de base comme la tristesse ou la peur, souvent adaptatives), secondaires (réactions émotionnelles à d’autres émotions, parfois moins utiles) ou instrumentales (émotions exprimées pour obtenir un certain effet). Une fois identifiées, la thérapie cherche à valider les émotions adaptatives tout en transformant celles qui sont dysfonctionnelles ou qui maintiennent des schémas négatifs.

Des techniques favorisent la libération émotionnelle et facilitent un travail en profondeur pour trouver des réponses émotionnelles plus adaptées. En mettant l’accent sur l’acceptation et la régulation des émotions, cette thérapie aide à construire une meilleure relation avec soi-même et avec les autres. Elle joue également un rôle clé dans la désactivation des automatismes émotionnels, en offrant des outils pour réagir de manière plus consciente et alignée avec ses besoins et ses valeurs.

  1. Reconstituer mes repères internes

La dernière étape est d’explorer mes valeurs fondamentales et de clarifier mes besoins. Cela me permet de définir un Surmoi plus aligné avec mes choix conscients, et non pas seulement avec les injonctions héritées. En identifiant ce qui est vraiment important pour moi, je redéfinis mes priorités et j’agis en cohérence avec mes aspirations.

Les relations interpersonnelles jouent également un rôle crucial dans ma reconstruction. La théorie de la neurobiologie interpersonnelle, de Daniel Siegel, montre que des interactions bienveillantes peuvent remodeler mes schémas neuronaux, me permettant de développer des connexions sociales plus saines. Ces relations agissent comme des modèles positifs, contribuant à reconstruire mon Surmoi et mon Empathie sur des bases plus équilibrées.

Grâce à une meilleure compréhension de moi-même et à mon engagement dans des actions concrètes pour développer une parentalité intérieure plus bienveillante et une meilleure connexion avec les autres, je me sens prêt à explorer, dans le prochain article, comment mieux naviguer dans mes territoires sociaux actuels et futurs. Mon objectif sera d’identifier et de cultiver les conditions optimales pour que le Bien s’épanouisse dans mon rapport à moi-même et aux autres, tout en intégrant les trois autres éléments clés définis dans l’article précédent : la connaissance de soi et du monde, l’éthique et mon état de santé.

Article suivant : Comment bien agir sans se faire du mal ?

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