Quand un proche nous fait souffrir, que cela soit par la peur, par la malveillance, le jugement négatif, la morosité qu’il peut générer, apparait un dilemme : que faire, continuer à aimer la personne ou s’en détacher ?
Quand une situation nous fait souffrir, par la peur, la difficulté, le jugement négatif qu’elle fait porter sur soi ou sur les autres, apparait un autre dilemme : vais-je m’accrocher dans la difficulté ou abandonner ?
Dans la vie, il y a des liens
En venant au monde, on hérite d’un petit bout de tricot fait de liens affectifs qui se tissent autour de nous. Il y a des cordons forts qui nous relient à ceux qui nous ont permis la vie, nos parents. Il y a des mailles qui se créent par dessus, les frères, sœurs, la famille. Puis viennent les amis et leurs amis, les amours, les petits, les grands, les collègues, les camarades de circonstances…
Le tricot fait comme il peut pour nous tenir chaud, mais au fond, quand on a manqué de bons liens, on aura froid et le souffle du maltraitement peut nous givrer plus profondément le cœur.
Le tricot de base, on le choisit pas, on ne nait pas tous bien au chaud. Parfois on a froid, et quand on a froid, on n’est moins attractif. Heureusement, parfois il y a de généreux tricots qui viennent nous apporter leurs chaudes laines. Et cela agit en nous comme un soleil.
Les liens nous lient, et ces liens sont parfois réconfortants, parfois tranchants, parfois stimulants parfois ennuyants, parfois drôles parfois angoissants, parfois bons et parfois maltraitants. La qualité des liens change au gré des humeurs et de leurs circonstances.
Il y a des liens que l’on ne peut pas couper sans que cela ne soit un drame. Plus ils ont été construits de chair, de sang et d’amour et plus ces liens ont une âme et plus les trancher fait de nous une sorte de criminel.
Comment faire avec les liens qui nous apportent plus de peines que de joies ?
Cela arrive quand le lien est corrompu, quand le tissu se fait de plus en plus étroit et nous lacère. Quand la relation est dysfonctionnelle, quand elle n’est pas ou plus basée sur le respect mutuel.
Il y a deux raisons possibles à un lien trop envahissant ou trop brutal. : soit c’est de la méchanceté soit c’est de l’ignorance.
Dans le cas de la méchanceté, c’est qu’il y a une souffrance qui doit se soulager, mais cela ne veut pas dire que c’est à nous de la soigner.
Dans le cas de l’ignorance, c’est qu’il y a un abus à corriger, mais cela ne veut pas dire que c’est à la personne qui a commis la méchanceté de s’en rendre compte d’elle-même.
La méchanceté doit nous pousser à nous éloigner, l’abus doit nous pousser à recadrer, communiquer, s’entourer et mettre le cadre en application.
Dans la vie, il y a des besoins
En venant au monde, on investit un corps. Vivre, c’est incroyable. Être au monde engendre sa part d’aventures, de joies, de plaisirs et de découvertes stimulantes. Cela engendre aussi sa part d’ennuis, de peines, de craintes, de hontes et de violences inhibantes.
Le corps, fait ce qu’il peut, il est ce qu’il est et il devient avec ce qui se trouve dans son milieu. Ce milieu qui le façonne et donne matière à ses comportements.
Le corps, on le choisit pas, on ne nait pas tous avec les mêmes ressources internes. Pourtant, il y a des corps moins aptes au jeu de la réussite et qui pourtant s’en sortent mieux moralement que ceux qui ont « les moyens de leurs besoins ». Nos besoins existent parce qu’une part du monde est nourricière (il y a de l’oxygène, de la nourriture, il y a des partenaires, il y a des énergies et des matériaux). Nos corps se sont construits avec ça ou peut-être même plutôt « pour ça ». Il n’y a pas de corps sans monde, il n’y a pas de monde sans besoins.
Les besoins s’activent au gré du temps et des expériences, tout plaisir que l’on connait fera apparaitre à l’avenir un manque quand le besoin sous-jacent n’est plus comblé. Connaitre des kiffes, c’est créer sur son avenir une dette qui induira en nous l’envie de les retrouver.
Dans notre monde, les besoins sociaux sont prédominants (pouvoir, fierté, honneur, popularité). Et la manière qu’on a de tenter de les combler consiste en le fait d’épouser des postures. Ces postures engendrent des responsabilités. Elles seront constamment évaluer par le groupe qui nous embarque dans nos responsabilités de position sociale. Il y a une sélection naturelle permanente des milieux dans lesquels nous évoluons ou que nous tentons d’évoluer et cela se passe en partie par les regards d’inclusion ou d’exclusion que nos congénères nous adressent.
Le groupe crée une âme par dessus les âmes. Construire un groupe, c’est contribuer à la mise au monde de cette âme. Entrer dans un groupe déjà existant, c’est devoir s’y adapter pour s’y faire adopter. Quitter un groupe, c’est engendrer une petite mort.
Comment faire avec les responsabilités sociales qui nous apportent plus de peines que de joies ?
Cela arrive quand la responsabilité devient toxique, quand le groupe se fait étroit et nous contraint plus qu’il nous épanouit. Quand la stimulation est dysfonctionnelle, quand elle n’est plus respectueuse de soi.
Il y a trois causes entrecroisées qui produisent une stimulation sociale trop épuisante ou trop contraignante : la crise, des objectifs flous ou inatteignables, le manque d’amour et donc de reconnaissance.
Dans le cas d’une préoccupation professionnelle envahissante, il faut d’abord analyser ce qui dans l’inconfort social lié à notre position relève du systémique (dysfonctionnement structurel) ou du passager (la crise).
Si c’est passager, il s’agit souvent de s’adapter. Et s’adapter en tant qu’humain c’est surtout réadapter la situation à soi. Ici communiquer au groupe ses difficultés pour réadapter les exigences à nos moyens est un bon point d’entrée.
Si c’est systémique, il faut évaluer la faisabilité et l’investissement en forces et en moyens personnels pour rendre structurellement notre rôle confortable. Si cela n’est pas faisable, nous pouvons changer de position ou changer de structure.
Il faut ensuite analyser la situation du point de vue relationnel, par exemple, est-ce l’employeur qui est responsable d’un burn-out ?
La question mérite réflexion. Et la bonne manière de la résoudre semble se faire en se penchant sur le rapport de domination du donneur d’ordres sur l’exécutant : plus la liberté de se comporter comme on le souhaite dans notre rôle est grande, plus le départ n’est pas sujet à contraintes, et moins l’employeur n’a de responsabilités dans un burn-out.
Et moi, qu’elle est ma responsabilité dans mon épuisement professionnel ?
La question mérite la même réflexion. Et la bonne manière de la résoudre semble se faire en se penchant sur le rapport de domination de mon Surmoi (l’instance d’auto-autorité en moi) sur mes agissements : plus la liberté de se comporter comme on le souhaite dans notre « enjeu de rôle » est grande, plus l’abandon n’est pas sujet à une contrainte interne trop éprouvante, et moins il y a de risques de burn-out. Plus l’amour de ma hiérarchie a de l’importance pour mon bien-être et plus je suis en dépendance affective. Plus je suis en dépendance affective, plus je suis esclave de la reconnaissance des autres. Plus suis esclave et plus je risque de me tuer à la tâche pour quelque chose qui ne m’appartient pas. Cela renvoi à la question : suis-je responsable de mon hétéronomie (être régie par des règles et des normes qui ne viennent pas de moi) ? Non, la victime n’est pas coupable de la manipulation du plus fort. Par contre nous sommes responsable de notre émancipation et de la montée en autonomie qu’elle implique. Il en est de notre unique responsabilité de déconstruire les valeurs, les règles et les normes qui ont une influence néfaste pour nous et de les remplacer par des nouvelles, les nôtres, celles qui produisent l’autonomie qui libère, qui apaise, qui donne confiance et amour.
Le dilemme entre persévérer et abandonner est le fruit d’un même arbre, la souffrance. Persévérer c’est endurer, abandonner c’est être dévoré par la peur. Si se dilemme apparait, il se résout avec la thérapie psychologique. Car quand on va mal on voit tout en noir et du coup ça serre pas à grand chose de tout envoyer en l’air (c’est ce qu’on fait dans ces cas là en général). Ensuite, quand on va mieux, il s’agit d’user de sa raison car il ne s’agit pas uniquement d’une stratégie d’adaptation pour réussir quelque soit le milieu dans lequel les hasards et les nécessités nous ont amenées. Notre équilibre dépend avant tout du choix des organisations qui sont les meilleurs pour mon potentiel d’accomplissement. Potentiel, inhérent à ma nature qui est différente de toutes les autres tout en étant une expression de la nature universelle qui nous unis toutes et tous. Plus prosaïquement, à quoi bon m’adapter à une situation qui ne m’apporte pas suffisamment de kiffes et de stabilité ?
En général, mieux vaut tout de même transformer son quotidien en faisant preuve d’émancipation constructive dans les organisations où nous sommes déjà que d’aller reproduire les mêmes difficultés dans des organisations différentes et idéalisées (à part bien sûr si elles apportent plus de sens que l’organisation actuelle). On ne se débarrasse jamais du Réel, si on n’est bon, on se débarrasse que de ces désagréments dans l’ici et maintenant. Et lorsqu’on les laisse derrière nous, nous pouvons être une force de transformation qui produit des projets sans avoir à rejeter la moindre valeur saine qui nous constitue. Nous avons appris à les défendre en adulte avec responsabilité et amour.
merci, j’aime vos partages plein de profondeur et de simplicité …
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Merci Marie pour ceci
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c’est vrai et je vous rejoins. Il faut se séparer de tout ce qui nuit à notre sérénité.
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